Révision triennale du loyer des baux commerciaux
La révision triennale du loyer commercial, prévue par le code de commerce, permet d’ajuster le loyer d’un bail commercial en fonction de l’évolution économique.
Elle concerne autant les bailleurs que les locataires et constitue un mécanisme légal d’adaptation du contrat à la réalité du marché.
Fondement juridique
Les articles L.145-38 et L. 145-39 du code de commerce autorisent la révision du loyer tous les trois ans, à la demande de révision de l’une ou l’autre des parties. Cette possibilité est d’ordre public : elle s’applique même si le bail ne la prévoit pas et ne peut être écartée par convention contraire.
L’objectif de cette révision est de maintenir un équilibre économique entre les droits du bailleur et ceux du locataire, tout en préservant la stabilité du bail commercial.
Conditions et procédure de la révision
Périodicité
La révision peut être demandée après trois années révolues à compter :
- de date d’entrée en jouissance du locataire, ou
- du point de départ du bail renouvelé.
De nouvelles demandes peuvent être formées tous les trois ans à compter du jour où le nouveau prix sera applicable.
Initiative
Le bailleur ou le locataire peut présenter la demande de révision.
Elle doit être notifiée :
- par acte d’un commissaire de justice (ancien huissier), ou
- par lettre recommandée avec accusé de réception.
La demande doit indiquer le montant du loyer proposé. Le nouveau loyer prend effet à la date de la demande.
Calcul du loyer révisé
Le loyer révisé doit correspondre à la valeur locative (article L.145-33 C. com.) tout en respectant le plafonnement indiciaire prévu par la loi.
Le principe du plafonnement
L’évolution du loyer ne peut excéder la variation de l’indice applicable :
- ILC (indice des loyers commerciaux) pour les activités commerciales et artisanales,
- ILAT (indice des loyers des activités tertiaires) pour les activités libérales et de bureaux.
La révision peut aboutir à une hausse ou une baisse, mais uniquement dans la limite de cette variation indiciaire.
La valeur locative comme référence de fond
Même plafonné, le loyer révisé doit rester conforme à la valeur locative réelle des locaux.
Celle-ci est appréciée selon les critères de révision légaux de l’article L.145-33 du code de commerce :
- les caractéristiques du local (surface, état, aménagements) ;
- la destination contractuelle du bail ;
- les obligations respectives des parties ;
- les facteurs locaux de commercialité (flux de clientèle, environnement économique, accessibilité) ;
- les prix pratiqués pour des locaux comparables.
La valeur locative est donc la base du calcul, tandis que l’indice ILC ou ILAT en fixe les limites d’évolution.
Les cas de déplafonnement du loyer
Dans certains cas, le loyer peut être révisé au-delà du plafond indiciaire. Ce déplafonnement suppose une modification matérielle des facteurs locaux de commercialité visés à l’article L. 145-33 du code de commerce entraînant une variation de plus de 10 % de la valeur locative (création d’un axe routier, ouverture d’un centre commercial, évolution du flux de clientèle, création d’un lotissement proche du local, etc.).
La jurisprudence exige une modification constatable, durable et objective.
Dans ce cas, la variation de loyer qui en découle ne pourra toutefois pas conduire à des augmentations supérieures, pour une année, à 10 % du loyer acquitté au cours de l’année précédente.
En cas de déspécialisation, le loyer plafond ne s’appliquera pas et le loyer est fixé à la valeur locative.
Interaction avec les clauses d’indexation (ou d’échelle mobile)
De nombreux baux commerciaux comportent une clause d’échelle mobile (indexation automatique du loyer).
Dès lors qu’en application de cette clause, le loyer a augmenté ou diminué de plus d’un quart par rapport au prix précédemment fixé contractuellement ou par décision judiciaire, la révision du loyer peut être demandée.
Cependant, tout comme précédemment, la variation de loyer qui découle de cette révision ne peut conduire à des augmentations supérieures, pour une année, à 10 % du loyer acquitté au cours de l’année précédente.
Exemple d’application de la révision triennale du loyer commercial
En l’absence de modification matérielle des facteurs locaux de commercialité entraînant une variation de plus de 10 % de la valeur locative
- Fixation initiale du loyer annuel à 100 000,00 €
- ILC à la fixation du loyer (3 ans auparavant) : 500
- ILC à la révision : 530
Le loyer plafonné sera donc de :
100 000,00 € x 530 / 500 = 106 000,00 €
Ainsi, si à la date d’effet de la révision, la valeur locative est de 110 000,00 €, le loyer ne pourra pas dépasser le plafond de 106 000,00 € et sera donc fixé à ce dernier montant. Si à l’inverse, la valeur locative est inférieure à ce loyer plafond, par exemple de 104 000,00 €, ce dernier montant sera retenu.
En présence d’une modification matérielle des facteurs locaux de commercialité entraînant une variation de plus de 10 % de la valeur locative
- Fixation initiale du loyer annuel à 100 000,00 €
- Valeur locative 3 ans après : 115 000,00 €
Le loyer est fixé à la valeur locative mais cette augmentation est lissée si elle conduit à des augmentations supérieures, pour une année, à 10 % du loyer acquitté au cours de l’année précédente.
Ainsi, le loyer ne pourra pas dépasser 110 000,00 € lors de la révision mais sera porté à 115 000,00 € l’année suivante. Il s’agit d’un mécanisme de lissage.
En présence d’une clause d’échelle mobile
- Fixation initiale du loyer annuel à 100 000,00 €
- Loyer en n+1 du fait de la clause d’indexation annuelle : 130 000,00 €
- Valeur locative en n+1 : 110 000,00 €
Ici, le loyer a, du fait de la clause d’échelle mobile, augmenté de 30% donc de plus d’un quart par rapport au prix précédemment fixé contractuellement. La révision du loyer peut donc être demandée et dans ce cas, le loyer sera fixé dans les conditions précédentes sans que cela n’entraîne, pour une année, une augmentation de 10 % par rapport au loyer acquitté au cours de l’année précédente.
En synthèse
La révision triennale du loyer commercial constitue un outil d’ajustement légal entre bailleur et locataire. Elle repose sur une procédure encadrée et des critères objectifs, destinés à préserver l’équilibre économique du bail.


