L’ILC baisse de –0,45 % au 3ᵉ trimestre 2025. Découvrez comment cette évolution peut réduire votre loyer commercial et quels leviers actionner pour en bénéficier.
L’ILC du 3ème trimestre 2025 recule sur un an : quelles conséquences pour votre bail commercial ?
L’INSEE a publié le 16 décembre 2025 l’indice des loyers commerciaux (ILC) du 3ᵉ trimestre 2025, qui s’établit à 137,09. Pour mémoire, au 3ème trimestre 2024, l’ILC s’établissait à 137,71 et augmentait de 3,03 % sur un an. Sur un an, il recule de 0,45 % par rapport au même trimestre de l’année précédente. Cette baisse de l’indice des loyers commerciaux, rare dans l’historique de l’ILC (une baisse sur un an est inhabituelle, mais pas totalement inédite ; des baisses annuelles ont déjà existé, notamment en 2020), interroge les professionnels du droit et les preneurs : un loyer peut-il diminuer lorsque l’indice recule ?
⚠️ Point clé : La réponse dépend de la rédaction de la clause d’échelle mobile, de la périodicité de révision du loyer et du contexte juridique du bail.
Cet article détaille les mécanismes d’indexation, de révision triennale et de renouvellement pour comprendre comment cette baisse peut se traduire concrètement sur l’impact sur bail commercial.
Comprendre l’indice des loyers commerciaux et son évolution
Qu’est-ce que l’ILC ?
L’indice des loyers commerciaux, créé par la loi de modernisation de l’économie du 4 août 2008, sert de référence pour l’indexation des loyers des baux commerciaux. Historiquement, il était composé :
- Pour 50 % de l’indice des prix à la consommation (hors tabac et loyers)
- Pour 25 % de l’indice du coût de la construction
- Pour 25 % de l’indice du chiffre d’affaires du commerce de détail
Toutefois, depuis le 4ème trimestre 2021, la formule de calcul a été modifiée : l’ILC évolue sur la base de 75 % IPC et 25 % ICC.
Publié chaque trimestre par l’INSEE, l’ILC s’applique aux activités commerciales ou artisanales. Les activités tertiaires relèvent quant à elles de l’indice des loyers des activités tertiaires (ILAT).
Une baisse exceptionnelle au 3ᵉ trimestre 2025
L’ILC 2025 est à 137,09 et recule de 0,45 % sur un an. Cette diminution intervient après plusieurs années de hausse continue, notamment :
- +3,03 % au 3ᵉ trimestre 2024
- +5,97 % au 3ᵉ trimestre 2023
- +5,37 % au 3ᵉ trimestre 2022
- +3,46 % au 3ᵉ trimestre 2021
Ce retournement s’explique principalement par l’évolution des composantes retenues dans la formule actuelle (inflation/IPC et coût de la construction/ICC). Pour les preneurs à bail, cette évolution soulève une question pratique : cette baisse peut-elle réduire le montant du loyer ?
L’indexation du loyer : mécanisme et conditions d’application
Le principe de l’indexation annuelle et la clause d’échelle mobile
La plupart des baux commerciaux comportent une clause d’échelle mobile qui permet d’ajuster le loyer périodiquement, généralement chaque année. La clause d’échelle mobile est d’abord contractuelle. Elle doit respecter les règles d’indexation du code monétaire et financier (notamment l’interdiction de prendre une période de variation d’indice supérieure à la période entre deux révisions) et, en bail commercial, interagit avec les mécanismes de révision légale (L. 145-38) et de révision « > 25 % » en présence d’une clause d’échelle mobile (L. 145-39).
La formule classique d’indexation s’écrit :
Loyer révisé = Loyer initial × (Nouvel indice / Ancien indice)
Si l’ILC 2025 baisse, le calcul mathématique produit mécaniquement un loyer inférieur. Mais encore faut-il que la clause le permette.
La clause d’indexation doit être symétrique
Une clause d’indexation qui exclut toute baisse (clause « plancher » ou indexation à sens unique) est réputée non écrite. La Cour de cassation l’affirme notamment (ex. Cass. 3e civ., 14 janv. 2016, n° 14-24.681 ; Cass. 3e civ., 12 janv. 2022, n° 21-11.169, et confirmations ultérieures). Il convient donc de corriger la date/référence et la sanction.
En pratique, vérifiez la rédaction de votre clause :
- Clause licite : « Le loyer sera révisé chaque année en fonction de la variation de l’ILC »
- Clause à risque : « Le loyer pourra être augmenté en fonction de l’ILC » (formulation unilatérale)
Si la clause est valable et rédigée de façon réciproque, la baisse peut se répercuter lors de l’échéance d’indexation prévue. En pratique, beaucoup de baux imposent une date d’effet et parfois une formalité (notification/calcul) : il est prudent d’acter le calcul et la date d’effet par écrit.
Que faire si le bailleur refuse d’appliquer la baisse ?
Si le bailleur conteste l’application de la baisse, plusieurs options s’offrent au preneur :
- Rappel écrit : adresser un courrier recommandé avec accusé de réception rappelant les termes de la clause et le calcul de l’indexation
- Saisine du juge : en cas de blocage, le tribunal judiciaire peut être saisi pour faire constater l’application de la clause
La prescription de l’action en répétition de l’indu est de cinq ans (article 2224 du Code civil). Le preneur qui aurait payé un loyer trop élevé peut donc réclamer le trop-perçu sur cette période.
La révision triennale : un second levier d’ajustement du loyer commercial
Le mécanisme de la révision légale des baux
Indépendamment de l’indexation annuelle, l’article L. 145-38 du Code de commerce prévoit un droit à révision du loyer commercial tous les trois ans. Cette révision triennale peut être demandée par le bailleur ou par le preneur.
La demande peut être faite par acte extrajudiciaire ou LRAR et doit préciser, à peine de nullité, le montant du loyer demandé ou offert. Le nouveau prix est dû à compter du jour de la demande (sous réserve des règles applicables). La révision triennale est encadrée par L. 145-38 du code de commerce.
Les limites de la révision triennale et le plafonnement de loyer
La révision légale des baux est plafonnée : la variation ne peut excéder celle de l’ILC intervenue depuis la dernière fixation du loyer (sauf si le bailleur démontre une modification matérielle des facteurs locaux de commercialité ayant entraîné par elle-même une variation de plus de 10 % de la valeur locative (et un lissage annuel de 10 % s’applique dans certains cas)). Ce plafonnement de loyer protège le preneur contre des augmentations excessives.
Avec un ILC 2025 en baisse de –0,45 %, un preneur peut théoriquement demander une révision du loyer commercial à la baisse, dans la limite de cette variation. Toutefois, en pratique, cette démarche reste rare car :
- Le preneur doit prendre l’initiative de la demande
- Le bailleur peut contester en invoquant une amélioration de la valeur locative (travaux, amélioration du quartier, etc.)
- La procédure peut entraîner des frais d’huissier et, en cas de désaccord, une saisine du tribunal
Articulation entre indexation et révision triennale
Une clause d’indexation peut coexister avec la révision triennale. La révision légale (L. 145-38) obéit à ses propres conditions de délai et de plafonnement, tandis que l’indexation suit la clause.
Dans le contexte d’une baisse de l’indice des loyers commerciaux, l’indexation annuelle reste le mécanisme le plus simple et le plus direct pour obtenir une diminution du loyer.
Le renouvellement du bail : conditions et mécanisme de déplafonnement
Le principe du plafonnement au renouvellement
À l’échéance du bail (généralement après neuf ans), le preneur bénéficie d’un droit au renouvellement. Au renouvellement, le loyer doit correspondre à la valeur locative (L. 145-33) et le taux de variation est plafonné par l’évolution ILC/ILAT depuis la fixation initiale du loyer du bail expiré, sauf modification notable (et avec perte du plafonnement en cas de tacite prolongation au-delà de 12 ans)
Si l’ILC 2025 a baissé, le plafonnement peut avoir pour effet de limiter le loyer du bail renouvelé à un niveau inférieur au loyer en cours.
Les exceptions au plafonnement : le mécanisme de déplafonnement
Le mécanisme de déplafonnement s’applique dans plusieurs cas :
- Modification de la destination du local
- Modification des facteurs locaux de commercialité (nouvelle zone commerciale, amélioration des transports, etc.)
- Modification des caractéristiques du local (travaux d’agrandissement, rénovation, etc.)
- En cas de tacite prolongation portant la durée au-delà de 12 ans
Dans ces hypothèses, le loyer du bail renouvelé est fixé à la valeur locative sans plafond (nb : l’augmentation issue de certains déplafonnements est lissée à hauteur de 10 %/an). Le bailleur peut donc demander une augmentation même si l’indice des loyers commerciaux a baissé. Ces conditions de renouvellement de bail doivent être examinées avec attention.
Stratégie de négociation en période de baisse de l’ILC
Pour le preneur, une baisse de l’indice des loyers commerciaux constitue un argument de négociation au moment du renouvellement. Plusieurs leviers peuvent être activés :
- Invoquer le plafonnement : si aucune exception ne s’applique, le loyer du bail renouvelé ne peut excéder le loyer en cours augmenté de la variation de l’ILC (ici négative)
- Contester la valeur locative : si le bailleur invoque une exception au plafonnement, le preneur peut demander une évaluation de loyer par expertise pour vérifier la valeur locative réelle
- Négocier d’autres conditions : durée du bail, répartition des charges, travaux à la charge du bailleur, loyer minimal garanti, etc.
En cas de désaccord, le preneur peut saisir le tribunal judiciaire pour faire fixer le loyer du bail renouvelé. La procédure peut être longue (12 à 24 mois), mais elle permet de sécuriser le montant du loyer. Des stratégies de médiation locative peuvent également être envisagées pour éviter un contentieux.
Points de vigilance et outils juridiques préventifs
Vérifier la rédaction de la clause d’échelle mobile
Avant de demander l’application d’une baisse, relisez attentivement votre bail. Vérifiez :
- L’indice de référence (ILC, ILAT, ICC, etc.)
- La périodicité de révision (annuelle, triennale, etc.)
- La date d’effet de l’indexation
- La formule de calcul
- Le caractère symétrique de la clause
Si la clause mentionne un autre indice que l’ILC (par exemple l’ancien indice du coût de la construction, ICC), vérifiez son évolution spécifique. Ces outils juridiques préventifs permettent d’anticiper les litiges.
Documenter la demande de baisse et la dématérialisation des procédures
Pour sécuriser votre démarche, conservez les éléments suivants :
- Copie du bail commercial
- Relevé de l’ILC 2025 publié par l’INSEE
- Calcul détaillé de l’indexation
- Courrier de demande adressé au bailleur
- Preuve de l’envoi (accusé de réception)
Ces documents seront nécessaires en cas de contentieux. La dématérialisation des procédures facilite aujourd’hui la conservation et la transmission de ces pièces.
Anticiper les évolutions futures de l’ILC et les facteurs d’ajustement
La baisse de 0,45 % constatée au 3ᵉ trimestre 2025 reste modérée. Les prochains trimestres pourraient confirmer cette tendance ou, au contraire, marquer un rebond. Pour anticiper :
- Consultez régulièrement les publications de l’INSEE
- Suivez l’évolution de l’inflation et du chiffre d’affaires du commerce de détail
- Évaluez l’opportunité de renégocier votre bail si la tendance baissière se confirme
- Examinez les modifications des facteurs locaux susceptibles d’affecter la valeur locative
En période de volatilité des indices, certains preneurs négocient des clauses d’échelle mobile lissées ou plafonnées pour limiter les variations brutales. D’autres intègrent des clauses de loyer minimal garanti pour sécuriser leurs prévisions budgétaires.
Le cadre légal : loi Pinel et protection du preneur
Les apports de la loi Pinel sur la révision du loyer commercial
La loi du 18 juin 2014 (« Pinel ») a notamment :
- consacré l’usage de l’ILC/ILAT pour le plafonnement/révision,
- instauré un lissage de certaines hausses (10 %/an) en cas de déplafonnement et dans certains cas de révision, et
- renforcé l’information sur charges/travaux (inventaire, état récapitulatif, etc.).
Dans le contexte d’une baisse de l’indice des loyers commerciaux, ces dispositions protectrices prennent tout leur sens. Le preneur peut s’appuyer sur la loi Pinel pour contester toute tentative de déplafonnement injustifiée.
L’évaluation de loyer et les critères de valeur locative
Lorsque le bailleur invoque une modification des facteurs locaux pour justifier un déplafonnement, l’évaluation de loyer devient nécessaire. Les critères retenus incluent :
- L’emplacement du local et son accessibilité
- La surface et la configuration des lieux
- L’état général du local et les travaux réalisés
- La destination et l’activité autorisée
- Les indicateurs de performance énergétique (DPE)
- Le dynamisme commercial du secteur
Les indicateurs de performance énergétique jouent un rôle croissant dans l’évaluation de loyer. Un local mal isolé ou énergivore peut justifier une décote, tandis qu’un local récemment rénové avec un bon DPE peut justifier une valorisation.
La périodicité de révision et l’impact sur la gestion du bail
La périodicité de révision prévue au bail détermine la fréquence à laquelle le loyer peut être ajusté. Trois configurations coexistent :
- Indexation annuelle : ajustement automatique chaque année selon la clause d’échelle mobile
- Révision triennale : ajustement tous les trois ans, plafonné à la variation de l’ILC sauf exceptions
- Révision au renouvellement : ajustement tous les neuf ans, avec application du plafonnement ou du mécanisme de déplafonnement
Dans le contexte d’une baisse de l’ILC 2025, la périodicité de révision devient un paramètre stratégique. Un bail prévoyant une indexation annuelle permettra au preneur de bénéficier plus rapidement de la baisse, tandis qu’une révision triennale nécessitera une démarche active.
Conclusion : une opportunité à saisir pour les preneurs
La baisse de l’indice des loyers commerciaux au 3ᵉ trimestre 2025 constitue une situation inhabituelle qui peut bénéficier aux preneurs de baux commerciaux. Toutefois, cette baisse ne se traduit pas automatiquement par une diminution du loyer : tout dépend de la rédaction de la clause d’échelle mobile et de la volonté du preneur de faire valoir ses droits.
Les leviers d’action sont multiples : indexation annuelle, révision triennale, renouvellement du bail. Chacun obéit à des règles spécifiques et nécessite une analyse au cas par cas. L’impact sur le bail commercial d’une baisse de l’ILC 2025 peut être significatif, mais il requiert une approche méthodique et documentée.
Le cadre posé par la loi Pinel offre des garanties supplémentaires aux preneurs, notamment en matière de plafonnement de loyer et de conditions de renouvellement de bail. Les outils juridiques préventifs, associés à une veille régulière sur l’évolution de l’indice des loyers commerciaux, permettent d’optimiser la gestion du bail et d’anticiper les ajustements nécessaires.
Pour les professionnels du droit, cette évolution de l’ILC rappelle l’importance d’une rédaction rigoureuse des clauses d’indexation et d’une veille régulière sur les indices de référence. Elle illustre également la nécessité d’informer les clients sur leurs droits et les mécanismes d’ajustement du loyer, dans un contexte économique en constante évolution.
En cas de doute ou de blocage, l’accompagnement d’un avocat spécialisé en droit commercial permet de sécuriser la démarche et d’optimiser les conditions du bail, qu’il s’agisse d’appliquer une clause d’échelle mobile, d’engager une révision légale des baux ou de négocier les conditions de renouvellement de bail.
FAQ
Peut-on baisser le loyer d’un bail commercial quand l’ILC baisse ?
Oui, parfois, si vous avez une clause d’indexation qui joue dans les deux sens, ou via certains mécanismes de révision. Sinon, il faut regarder les autres leviers (révision triennale, renouvellement, négociation).
ILC ou ILAT : comment savoir lequel s’applique ?
En simplifiant : ILC pour activités commerciales/artisanales ; ILAT pour activités tertiaires autres (bureaux, professions libérales, entrepôts logistiques…).
Une clause d’indexation « uniquement à la hausse » est-elle valable ?
Elle est à haut risque : la jurisprudence admet qu’une clause d’indexation ne jouant qu’à la hausse puisse être réputée non écrite (avec débats sur ce qu’on retranche exactement).
Révision triennale : l’indice plafonne-t-il toujours ?
En principe, la variation est capée par l’indice (ILC/ILAT), sauf hypothèse spécifique de modification matérielle des facteurs locaux de commercialité (et dans ce cas, un encadrement annuel existe).


